(Unità Naziunale Publié le 13 février 2020 à 12h30) Chers collègues, Pour débuter cette séance, je veux saluer la mémoire de Jean-Dominique Pianelli, ancien Secrétaire général de l’Assemblée de Corse.
D’abord Secrétaire général adjoint à l’ancien Etablissement Public Régional, il a dès le mois d’aout 1982, participé à la mise en place de la nouvelle institution sous la présidence de Prosper ALFONSI et assuré à compter de cette date la fonction de Secrétaire général de l’Assemblée jusqu’en 1995, date de son départ à la retraite. Jean-Dominique Pianelli possédait un sens aigu du service public, toujours disponible et à l’écoute des élus il était également très proche de son personnel avec qui il a conservé des liens très forts jusqu’à son décès. Je salue les membres de sa famille présents dans les tribunes et les assure de tout notre soutien dans cette épreuve. Je vous demande d’observer une minute de silence.
Au nom de notre Assemblée, je veux également transmettre notre soutien à toutes les équipes qui luttent actuellement contre les incendies et à toutes les personnes touchées, à Sulinzara, à U Sulaghju, à A Petracurbara, à Rutali, Poghju Mezana, Olmeta di Tuda. Heureusement, aucun blessé n’est à déplorer et aucune habitation n’a été touchée. Toutefois, la catastrophe écologique nous rappelle cruellement celle de janvier 2018 à Cervione ou de 2019 à Calenzana. Et, au-delà des hectares partis en fumée ces derniers jours, c’est la récurrence des feux hivernaux qui nous inquiète. Depuis trois ans, la Corse brûle plus en hiver qu’en été. Non pas que la situation précédente était préférable, mais cela demande une adaptation forte de nos politiques de prévention et de lutte contre le feu. Selon nous, ils sont liés au réchauffement climatique. Mais, même si tel n’était pas le cas, nous devons désormais garder à l’esprit qu’il faut se méfier autant des incendies du mois d’août que de ceux de février ! Dans ce domaine, il semble ainsi nécessaire d’aller plus loin dans notre réflexion et dans nos actions. Il nous faut élaborer une stratégie hivernale. L’allongement de la saison feux de forêt et l’attribution de moyens aériens supplémentaires et permanents sont des impératifs. Selon moi, la Collectivité de Corse doit également s’engager dans une large réflexion en termes de gestion des forêts, de formation de tous ceux qui y travaillent et de sensibilisation de la population et de tous les usagers de la forêt. Ces incendies finissent de nous convaincre, s’il en était besoin, qu’en déclarant l’urgence climatique et écologique – et donc en choisissant d’adapter nos politiques publiques pour lutter contre celle-ci – nous avons pris la bonne décision.
Je veux aussi féliciter Dominique Federici qui a été élu cette semaine Président de l’Université de Corse Pasquale Paoli. Je salue également le nouveau Vice-Président du Conseil d’Administration Alain Di Meglio. Je demeure convaincu que cette nouvelle équipe saura répondre à tous les enjeux et qu’elle est prête à relever les défis du XXIe siècle. Je lui renouvelle ici tous mes voeux de réussite dans cette tâche, une tâche lourde mais ô combien importante pour notre jeunesse ! Ces enjeux, nous les avons clairement identifiés et nous pensons que nous devons renforcer les liens avec l’Université qui est un partenaire incontournable. Nous devons travailler avec elle à l’insertion professionnelle des étudiants et au transfert de ce capital humain dans le tissu économique, social et culturel corse. Elle doit intervenir également dans les grands débats que nous avons, comme celui sur le changement climatique par exemple. Enfin, elle est un formidable outil de diffusion de la connaissance et chacun ici mesure l’importance de l’éducation et de la formation dans une île qui se trouve dans une situation trouble.
Et l’actualité tragique, je veux parler du drame qui s’est déroulé à Corti à la fin du mois de janvier, nous le rappelle. Après le meurtre de Barthélémy Casanova, je voudrais tout d’abord que nous ayons une pensée pour ses parents, pour son épouse et sa petite fille ainsi que pour ses amis et tous ceux qui lui étaient proches. Ce drame nous replonge dix ans en arrière, toujours à Corti, au moment de la mort d’Antoine Casanova. Ces drames, nous ne pouvons les accepter, nous ne pouvons les comprendre et nous sommes indignés. Ils nous enseignent que notre société est malade. Mais nous devons aller au-delà des mots et agir. C’est ce que j’ai dit la semaine dernière lors de la séance de l’Assemblea di a giuventù. C’est ce que je veux redire aujourd’hui devant vous. En tant qu’élus, notre responsabilité est immense.
Ce qu’il faut faire, nous le savons : mettre en oeuvre des politiques publiques ambitieuses et solides dans le domaine de l’éducation prioritairement, mais aussi en faveur de la jeunesse et de la justice sociale. Voilà les trois axes qu’il nous faut développer et qui contribueront à l’épanouissement de notre jeunesse et plus largement de notre peuple. Cela, nous avons commencé à le faire et nous continuerons, même si nous savons que nos choix ne peuvent avoir de retombées positives immédiatement.
Nous avons aussi une responsabilité comme citoyens. Chacun de nous possède des moyens d’agir, certes mineurs, mais qui, cumulés, peuvent produire des effets très positifs. Il s’agit à mon sens de promouvoir des valeurs d’entraide, de générosité, de solidarité envers les plus défavorisés.
Il s’agit aussi de donner à nos jeunes les outils pour comprendre l’importance du travail. Heureusement, ces valeurs sont encore vives en Corse notamment grâce aux nombreuses associations caritatives et à leurs bénévoles qui mettent leur temps et leur énergie au service des autres.
Pour autant, la société actuelle, particulièrement au sein de la jeunesse, semble s’orienter vers un goût plus prononcé pour la possession plutôt que pour le bien-être. Cette société, celle de la consommation, laisse l’individualisme progresser. Le souci de l’autre, lui, régresse.
Certains économistes appellent ce phénomène « la croissance qui abîme ». Ce modèle, nous continuerons à le rejeter avec force. Il abîme non seulement la terre et l’environnement, mais il abîme aussi les hommes et les fait s’éloigner des grands principes de l’humanisme. La situation est complexe et il ne s’agit pas de plaquer des grilles de lecture simplificatrices pour sortir de l’impasse dans laquelle se trouve la Corse.
Où que l’on se tourne, on ne trouvera pas de solution préconçue. Il nous faut donc unir toutes les forces, c’est-à-dire celles de l’action publique et celles des citoyens, pour sortir de cette mauvaise société de l’avoir et construire peu à peu la société de l’être.