«Les Femmes et le conflit en #Corse » @bartoli_serena « Ces condamnations, les femmes, les mères, les filles des prisonniers politiques en pâtissent, elles sont les victimes collatérales d’un conflit que Paris ne semble pas souhaiter voir s’achever »

(Unità Naziunale Publié le 8 mars 2019) Dans le cadre de la journée internationale des droits des femmes, la rencontre-débat « Destini di Donne » portera cette année sur le thème : «Les Femmes et le conflit en Corse»

Elle a eu lieu le vendredi 8 mars 2019 à 10h00, dans le salon d’honneur de la Collectivité de Corse à Aiacciu.

Dans le cadre de la journée internationale des droits des femmes, le Président de l’Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni a choisi de mettre en lumière la façon dont les femmes ont eu à subir les conséquences du conflit que la Corse a connu durant quarante années.

Qu’elles aient été elles-mêmes incarcérées, qu’elles soient mère, compagne ou fille d’un prisonnier politique, elles partageront leur expérience et expliqueront quel a été ou quel est toujours leur quotidien ainsi que les difficultés à surmonter.

Cette rencontre-débat a eu lieu le vendredi 8 mars 2019 dans le salon d’honneur de la Collectivité de Corse à Aiacciu.

Elle a réunie Maria Santoni, Stella Lacrimini, et Serena Bartoli. Jackie Poggioli et Marianna Thibout-Calandrini étaient également présentes.



L’intervention de Serena Bartoli, compagne d’un prisonnier politique.

Les militantes politiques quand elles ne sont pas directement ciblées par la répression, ont à la subir à travers l’incarcération d’un de leur proche.

Incarcération qui se traduit tout d’abord sur le plan personnel par un déchirement, celui que toute femme éprouve lorsqu’on lui retire son fils, son père, son frère ou son mari.

L’Etat en incarcérant les militants du mouvement national punit aussi et surtout leurs familles.

L’Etat condamne des enfants à grandir sans leurs pères, l’état empêche le maintien des liens familiaux au travers de l’exil carcéral que de trop nombreuses familles ont encore à subir, l’état plonge aussi des familles dans la précarité en ôtant au foyer un salaire, puis en condamnant presque à chaque fois à de lourdes amendes qu’il est impossible de payer à sa sortie de prison.

Ces condamnations, les femmes, les mères, les filles des prisonniers politiques en pâtissent, elles sont les victimes collatérales d’un conflit que Paris ne semble pas souhaiter voir s’achever.


Les proches des prisonniers politiques sont également dans la plupart des cas des militantes politiques elles aussi, qui, des tribunaux aux parloirs, continuent inlassablement a militer, et à soutenir les leurs durant les nombreuses années d’incarcération qu’ils ont à effectuer, Maria ici présente en est le plus parfait exemple.

Celui d’une militante infatigable qui depuis plus d’une vingtaine d’années est impliquée à la fois au sein de Corsica Libera et de l’Associu Sulidarità, tout en continuant de visiter son fils au parloir à Borgu (Après avoir fait des milliers de kilomètres chaque mois des années durant lorsqu’il était maintenu en exil carcéral).

Pour ma part, j’ai tout d’abord visité mon oncle au parloir durant mon enfance alors qu’il Était incarcéré en région Parisienne, puis lorsque qu’il Était assigné à résidence toujours sur Paris, et pour finir, ce fut le parloir de Borgu après qu’il ait été incarcéré de nouveau suite à son procès.

En tout, il aura fait 7 ans de prison, 7 ans de parloirs pour toute une famille.

Aujourd’hui, c’est mon compagnon Ghjiseppu Maria Verdi qui est incarcéré à Borgu, condamné à 6 ans de prison, incarcéré depuis pres de deux ans et demi, et me voilà de retour dans les parloirs pour le voir quelques heures par semaine.

« Mon cas n’a rien d’exceptionnel. Les dommages collatéraux ont été le lot de nombreux Corses et ce que je raconte c’est ce que vivent encore 10 familles corses »

En parallèle, ma mère a été mise en examen pour un pseudo délit de solidarité, placée sous contrôle judiciaire elle a pointé tous les premier du mois pendant quatorze mois avant d’avoir droit à un non lieu, je parle de mon cas et de ma famille, mais cette situation n’a rien d’exceptionnel, c’est ce que vivent actuellement 10 familles Corses, c’est ce que vivent des centaines de familles depuis le début de ce conflit.

Il est temps aujourd’hui après plus de 40 ans de conflit, après les siècles de prison infligés, après les trop nombreux deuils que les familles ont eu à porter, que l’état s’engage enfin en faveur de la Paix.

Le peuple Corse a déjà fait sa part du chemin, et il est plus que temps d’entamer un véritable processus de paix, pour que plus aucune femme, pour que plus un seul homme, n’ait à payer de sa liberté ou de sa vie son engagement pour la survie de son peuple, pour le droit à l’existence de sa nation.

Serena Bartoli



A l’issue de cette rencontre, Jean-Guy Talamoni a signé la Charte européenne pour l’égalité femmes-hommes aux côtés de Lauda Guidicelli, Conseillère exécutive en charge de ce sujet, notamment. A travers cette Charte, la Collectivité de Corse prendra publiquement position sur le principe de l’égalité des femmes et des hommes et s’engagera à la mettre en oeuvre via un plan d’actions qu’elle devra rédiger.

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