Les principaux candidats sont déjà sur la ligne de départ. Pourquoi Femu a Corsica tarde à s’engager ?
Gilles Simeoni : Nous n’avons pas tardé à nous engager…
Les candidatures viennent à leur heure. Cette élection s’inscrit dans une séquence politique forte qui a débuté il y a quatre ans.
Avec Femu a Corsica, nous avons ouvert une nouvelle voie aux municipales de 2008, nous avons poursuivi et amplifié notre action aux territoriales de 2010, aux cantonales l’an dernier. Le calendrier électoral se prolonge avec les présidentielles et les législatives. C’est dans cette dernière séquence que nous intégrons notre présence.
Vous avez eu de bons résultats aux dernières élections locales et régionales. Vous ne risquez pas de perdre de la crédibilité en cas de score médiocre ?
Jean-Christophe Angelini : Non, pas du tout. Si notre analyse de la situation corse remonte à plusieurs années, il y a toujours urgence à y répondre en termes de mobilisation et d’actions et nous avons toujours privilégié le terrain électoral.
Nous voulons entrer en résonance avec la société corse à travers un message politique fort dans un scrutin qui n’est pas simple, je l’admets. Mais surtout, on s’aperçoit que la question corse est cruellement absente de la campagne présidentielle, ce qui ne s’était jamais produit depuis trente ans.
Notre objectif stratégique consiste donc à porter très haut la voix de la Corse, pas seulement pour témoigner, mais pour gagner.
PNC, Inseme et A Chjama. Concilier trois mouvements au sein d’un même parti, ce n’est pas facile. Comment allez-vous procéder dans la désignation des candidats ?
GS : La désignation des candidats s’est faite de façon naturelle, sans aucune difficulté. Femu a Corsica regroupe, comme vous l’avez signalé, trois mouvements, mais pas uniquement. Il y a aussi d’autres forces vives du pays dont nous tenons compte. Nous avons vocation à nous élargir encore davantage. Nous sommes sur une dynamique qui doit nous conduire à la victoire. Nous voulons construire une Corse ouverte et généreuse avec toujours cette volonté de mettre le peuple corse et les aspirations des Corses au cœur du débat. C’est dans cet esprit que se sont décidées les candidatures.
Qui sont les candidats ?
GS : La désignation de tous les candidats se fera dans un deuxième temps. Aujourd’hui, nous formalisons une double candidature. Jean-Christophe est candidat dans la deuxième circonscription de la Corse-du-Sud et moi, je suis candidat dans la première circonscription de Haute-Corse. Au-delà de nos engagements individuels, nous avons souhaité annoncer officiellement notre candidature côte à côte. C’est un choix stratégique. C’est une volonté collective pour nous donner les moyens de gagner. En 2010, ceux qui avaient la responsabilité politique d’ouvrir le jeu ne l’ont pas fait. Ils ont gâché une chance énorme. On ne vit pas dans la rancœur, mais on dit maintenant au peuple : si vous voulez que le changement se concrétise, il faut qu’on gagne.
La philosophie de Femu a Corsica, c’est de transcender les clivages au profit du rassemblement. Comment y parvenir dans ce type de scrutin qui balaie tout le spectre des idéologies partisanes ?
JCA : C’est vrai, mais contrairement à tous les autres candidats qui se mettent en mode individuel, nous, nous faisons le choix d’annoncer notre candidature ensemble, conformément au souci constant de cohérence et d’unité de Femu a Corsica. Il ne s’agit pas ici d’élections locales avec des programmes basiques et nous voulons nous hisser à la hauteur de l’enjeu, par-delà le schéma classique droite-gauche, celui d’un combat contre un système qui n’a cumulé que des échecs politiques, économiques et sociaux. Nous pouvons bouger les lignes et bousculer les clivages grâce à une offre politique alternative pour l’intérêt de la Corse contre l’archaïsme et l’immobilisme.
Les maires qui ont besoin des aides publiques pour développer leurs communes ne sont-ils pas pieds et poings liés par les collectivités de tutelle ?
GS : Le système politique corse est largement verrouillé et cette tendance va en s’accentuant. On se rend compte aujourd’hui que le corps social insulaire est corseté, à travers le chantage à l’emploi, les subventions, le clientélisme. C’est ce système que nous remettons fondamentalement en cause. Nous voulons changer les choses à travers le chemin démocratique. Nous pouvons le faire, nous y croyons, et nous sommes persuadés que nombre de Corses y croient aussi fort que nous. Il peut y avoir un printemps du peuple corse. Maintenant.
Vous aspirez, vous-même, à devenir maire. Vous confirmez ?
GS : Oui, je suis engagé dans le combat municipal à Bastia.
JCA : Je confirme aussi mon engagement à Porto-Vecchio.
Jean-Christophe Angelini, un sondage mystérieux faisait de vous le premier député nationaliste de France. Ça vous inspire quoi ?
JCA :J’ai ma petite idée sur l’origine de ce sondage, mais pas d’éléments concrets pour m’étendre sur le sujet. Il est vrai que depuis l’élection cantonale, un espace politique assez considérable s’est ouvert. Camille de Rocca Serra est très contesté comme député sortant, on l’a vu au moment des investitures, et en tant que président de groupe à l’assemblée. Comme à Bastia, les conditions sont remplies pour un résultat historique.
Gilles Simeoni, les nationalistes avaient contribué en 2007 à la victoire du député UMP sortant. Vous ne vous sentez pas aujourd’hui en porte-à-faux ?
GS : Absolument pas. Notre présence est logique. Elle a une grande cohérence politique. Nous sommes contre le système, dans une démarche de construction. Nos idées ne sont pas en situation d’être défendues, ni par Sauveur Gandolfi-Scheit ni par Jean Zuccarelli.
Ce n’est pas à contrecœur que vous quittez la deuxième circonscription ?
GS : Mon ancrage familial et affectif est connu dans la deuxième circonscription, mais ma vie a toujours été à Bastia.
Quel type de campagne comptez-vous mener ?
JCA : Même dans notre logique d’opposition, on a toujours dénoncé et proposé en étant constamment présents sur le terrain et dans les scrutins. Depuis l’union initiée en 2004, même des gens venus d’autres horizons nous ont rejoints pour enrichir notre espace politique. Cette conception moderne d’ouverture, affranchie de tout repli identitaire, permet de rassembler un maximum de Corses autour de la construction d’un pays, au-delà des dogmes et des étiquettes.
GS : Nous menons une campagne pour battre le système en place, pour nous deux en l’occurrence le système UMP dans le sud et la dynastie Zuccarelli dans le nord.
Présidentielles : les candidatas interpellés le 17 mars à Ajaccio
S’agissant de la présidentielle, ferez-vous campagne pour Eva Joly ?
GS : Femu a Corsica n’est pas engagé dans un soutien quel qu’il soit derrière un candidat à la présidentielle. Il est naturel que le PNC ait parrainé Eva Joly, Mattea Lacave a porté, pour sa part, son choix sur Philippe Poutou. Mais il faut distinguer les accords politiques du fond politique. Il nous appartient d’interpeller tous les candidats et d’analyser précisément les réponses qu’ils nous feront avant de nous prononcer.
De quelle manière allez-vous les interpeller ?
JCA :Le samedi 17 mars à Ajaccio, élus et militants de notre mouvement solliciteront publiquement un certain nombre d’orientations auprès de tous les candidats à la présidentielle. Dans la foulée, chacun recevra un courrier. Parmi les thèmes, celui des institutions et de la réforme de la Constitution pour la reconnaissance du statut, de la langue, de l’identité collective, et celui, plus immédiat, des arrêtés Miot et de la compétence fiscale. Nous nous déterminerons en fonction des positions claires qui nous parviendront. GS :J’ajoute que nous voulons engager une négociation entre la Corse et l’État. La Corse est absente du débat présidentiel, sauf lorsqu’elle est instrumentalisée.
Je pense notamment à la visite de Jean-Luc Mélenchon à Bastia qui a tenu un discours rétrograde sur la langue et la culture. Jean Zuccarelli, lui, s’en est félicité…
Le cumul des mandats est un thème récurrent dans cette campagne, et il vous concerne. Si vous êtes élu député, à quels mandats renoncerez-vous ?
JCA : Étant avant tout des opposants, nous sommes l’un et l’autre en situation de cumul très relative. Mais par principe, nous sommes favorables à la limitation du cumul des mandats. On réfléchira le moment venu et, de toute façon, les décisions seront collégiales. Contrairement à d’autres, nous ne sommes pas dans les effets d’annonce. On livre un combat pour le gagner. Tout ce que je peux ajouter, et vous en tirerez les conclusions que vous voulez, mais l’enracinement local est pour nous capital. GS : Dans l’immédiat, nous y allons pour gagner. Il faut s’imaginer ce que serait la victoire d’un nationaliste à la députation… Nous aurons ensuite deux ans pour réfléchir et décider.
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