Depuis le fameux texte signé Monseigneur Lacrampe (en fait rédigé par un membre corse du Conseil épiscopal), on n’avait plus lu dans la presse une telle charge contre le nationalisme, mais plus largement contre la Corse. À l’époque, l’évêché avait dû faire marche arrière devant la levée de boucliers : des confréries entières menaçaient de démissionner.
Mais ici, il ne s’agit pas d’un évêque mais d’un diacre, s’érigeant – motu proprio – en modèle de vertu et en panneau indicateur, dans une interview publiée par le Corse-Matin du 31 décembre. Passablement enclin au péché d’orgueil – et encouragé par la présentation hagiographique de la journaliste, qui lui promet le paradis, pas moins ! –, il expose avec fierté son parcours professionnel : « 2010 : je me suis vu attribuer le poste de Directeur régional adjoint (du pôle emploi) ! » Très impressionnant !
Mais malgré le prestige et l’autorité intellectuelle indiscutable que lui confère cette récente promotion, c’est au nom de l’Eglise qu’il prétend s’exprimer : « C’est le rôle de l’Eglise de dire… » Ah, bon. C’est lui qui dit ce que doit dire l’Eglise ? Il est vrai que le nouvel Evêque n’est pas encore désigné, mais quand même ! Fort de son éminente position (pas dans l’Eglise mais dans Corse-Matin, avec photo à la une !), il déverse un fatras de considérations sociologico-historico-théologiques d’une profondeur comparable à celle d’une boîte de conserve, fustigeant pêle-mêle « Plus belle la vie », l’avortement, les femmes (qui ne récitent plus le chapelet !)… Il livre le plus sérieusement du monde une approche essentialiste de la corsité, d’où viendrait tout le mal : « Nous avons le goût des armes. Même nos menhirs sont armés… » Sans blague ?
On reste confondu devant une telle perspicacité. Puis il en arrive au vrai message, celui qu’il convenait de délivrer : « Le FLNC est un mélange mal digéré de marxisme, de gauchisme et d’écologisme. » Et, s’il ne semble avoir lu ni Marx ni Thoreau, notre Bossuet du cours Napoléon n’en poursuit pas moins doctement, affirmant que le FLNC dévoie les jeunes… Ah oui, le vieux refrain – pardon, la vieille antienne – sur les jeunes qui sont prêts à suivre n’importe qui ! Il suffirait, pour faire litière d’un tel argument, de rappeler les rimes de Brassens : « Le temps n’a rien avoir à l’affaire, quand on est…
Nous ne dirons pas, par charité – chrétienne –, que notre homme est une parfaite illustration de la chanson… Mais quand même, un ton si péremptoire, lorsque l’on prétend aborder des thèmes de cette complexité, n’est pas un indice de sagesse. Les seules personnes trouvant grâce à ses yeux sont deux défunts (Marie-Jeanne Bozzi et Antoine Nivaggioni) et – c’est là que ça devient intéressant – le Président du Conseil général de la Corse-du-Sud. Nul doute que disposant de davantage de place, il se serait livré à un éloge du préfet, lequel est, il est vrai, son supérieur hiérarchique.
Dans cette longue – et pesante – interview de fin d’année, pas un mot de la part de notre humaniste sur ceux qui passeront les fêtes en prison pour avoir défendu la Corse.
Il a toujours existé dans l’Eglise, un courant se situant résolument du côté du manche. Il est clair que s’il avait vécu au XVIIIe siècle, Monsieur Peretti n’aurait pas fait partie des théologiens d’Orezza, qu’il n’aurait pas été un compagnon de Circinellu…
Qui, du reste, n’aurait probablement pas voulu de lui…
Article à paraitre dans le Ribombu Internaziunale de Janvier
Vous aimez cet article ? Faîtes-en profiter vos amis !
Faites passer l’information autours de vous en cliquant sur :