(Unità Naziunale – 25 septembre 2017 – 14h00) Le mois de septembre est généralement celui où nous regardons avec nostalgie nos photos de vacances, avant de nous replonger dans la routine et la montagne de problèmes liés au travail qui nous attend.
ous, les familles et amis de prisonniers et exilés politiques basques, cependant, n’avons pas beaucoup de photos à ressortir, faute de temps et faute de conditions pour sortir l’appareil et sourire.
Nous avons passé un été compliqué, rude. La politique de dispersion basée sur la vengeance ne prend pas de vacances et, cette année encore, les familles et amis de prisonniers ont dû l’affronter. Cela fait déjà 28 ans que nous supportons la chaleur de l’été et le froid hivernal pour pouvoir rendre visite à nos parents et amis dans les prisons lointaines où ils sont placés. Nous avons, tatoués sur la peau, le nombre incalculable de voyages, les kilomètres, les tensions, la souffrance silencieuse qui passe inaperçue en raison du rythme frénétique des événements sociaux.
Durant cet été interminable, nous avons de plus connu des moments tragiques. Le dernier jour du mois de juillet, alors que nous nous remettions à peine des émotions vécues lors du festival solidaire et très réussi Hatortxurock, nous avons reçu en plein cœur la nouvelle de la mort à la prison de Badajoz du prisonnier de Galdakao Kepa del Hoyo. C’est la politique de dispersion qui a emporté Kepa et nous voulons souligner, une fois de plus, la dignité exemplaire montrée par sa famille.
Les photos de l’été nous rappellent que notre revendication est arrivée aux portes de l’église, au sanctuaire de Loiola, à Azpeitia, où nous avons remis notre dernier rapport au président Urkullu. Encore très secoués de la nouvelle de la mort de Kepa, nous avons demandé à Iñigo Urkullu de prendre les responsabilités qui sont celles du poste qu’il occupe et de continuer à travailler pour en finir avec la dispersion et obtenir la libération des prisonniers gravement malades.
Nous avons également les photos des plages. Nous n’y sommes pas allés prendre le soleil, ni nous baigner. Nous sommes allés dénoncer la douleur et les conséquences perverses de la politique de dispersion sur 16 plages basques, parce que pour notre part, au lieu de nous reposer sur le sable de Cadix, nous passons nos vacances dans les étroits parloirs de Puerto I, ou, comme la famille de Juan Mari Etxabarri, dans la salle d’attente de l’hôpital de Séville, qu’il a récemment quitté pour retrouver sa cellule.
Il est souvent difficile de garder le moral en période de rentrée. Ça l’est encore plus pour la petite Izar, qui vit ces premiers jours dans un environnement étranger en conséquence de la soif de vengeance qui les maintient, elle et sa mère Sara, loin de chez elles, de façon à ce qu’elles n’établissent aucun lien affectif dans leur village et avec leur entourage.
Les défis de cette nouvelle année ne vont pas être simples. Un nouveau scénario s’est ouvert le 8 avril, sous l’impulsion de la société civile qui a mené le processus de désarmement jusqu’à son terme. Ce nouveau scénario a mis de nouveaux facteurs et objectifs tactiques en avant, particulièrement celui que nous poursuivons depuis toujours : le retour chez eux des prisonniers et exilés, vivants. Il faut absolument que les acteurs politiques, sociaux et syndicaux s’emparent de cette demande et de ce souhait de la société basque et y travaillent de façon conjointe, car nous devons répondre en tant que peuple pour en finir définitivement avec le conflit politique.
Le train de la résolution est déjà passé par de nombreuses gares. Parfois avec un gros retard, parfois avec quelques wagons qui allaient dans le sens contraire. La prochaine doit être celle de la fin de la politique de dispersion et de la libération des prisonniers gravement malades. C’est la priorité. Nous sommes aux portes de la mise en marche de la dynamique de réponse en tant que peuple nécessaire pour y arriver, une dynamique basée sur un grand accord social. Parce que nous ne pouvons pas attendre plus longtemps. Nous ne sommes pas disposés à supporter un autre accident, encore moins à écouter des mots creux et non suivis d’effets. Nous savons tous ce qui peut arriver n’importe quand sur les routes ou derrière les barreaux. Cette politique d’exception et de vengeance a déjà tué 16 personnes dans des accidents sur les routes de la dispersion, et plus encore en prison et en exil.
Nous savons qu’il reste énormément de travail et nous continuerons d’en prendre notre part. Dans l’objectif d’arriver à cette nouvelle gare avec le plus large consensus possible, nous nous sommes réunis avec un très grand nombre d’acteurs politiques, syndicaux et sociaux. Chacun est indispensable dans ce voyage. Le Forum Social Permanent poursuit également sa tâche, plus encore depuis la fermeture du chapitre du désarmement et la publication par le Collectif des Prisonniers Politiques Basques d’une contribution constructive et convergente.
Nous continuerons également de voyager en Europe dans le but de surmonter le blocage que nous imposent les États espagnol et français. Après des rencontres avec des acteurs politiques et de défense des droits humains en Suisse, en Allemagne, au Danemark et en Suède, Etxerat se rendra dans les semaines et mois qui viennent en Norvège, Finlande, Irlande, Angleterre et Belgique.
Nous ne sommes pas disposés à continuer à attendre. La société basque a réclamé à maintes reprises le rapprochement des prisonniers et la libération de ceux qui sont gravement malades et il relève de la responsabilité de l’ensemble des acteurs politiques, syndicaux et sociaux de faire de ces revendications une réalité. Si nous voulons, en septembre prochain, regarder nos photos des plages de Cadix, il faut se mettre au travail.
Ça suffit !
Nous les voulons vivants et à la maison !
ETXERAT
19 septembre 2017