#Corse – Pourquoi l’Europe devrait accepter un référendum en Catalogne

Les Catalans ont des griefs historiques à l’égard de l’Espagne qui se sont beaucoup aggravés au cours des dernières années.

Le refus de l’exécutif espagnol de dialoguer et même de ne jamais considérer les propositions venant de l’exécutif catalan, en ce compris une tentative honnête de renégocier le statut d’autonomie de 1979, a finalement débouché sur une situation d’impasse. Au début de 2005, un nouveau texte du statut fut rédigé et approuvé par le Parlement catalan. Ensuite, ce texte fut examiné et approuvé par les Cortès espagnoles, mais après seulement que bon nombre de dispositions essentielles euent eté purgées ou simplement retirées. Finalement, ce texte amende fut voté par les Catalans résignes au moyen d’un référendum. Pourtant, en 2010, un Tribunal constitutionnel pour le moins très peu neutre avait jugé que divers articles dudit statut, approuvé et deux fois ratifié, étaient inconstitutionnels et que bon nombre d’autres dispositions devaient être interprétés de façon restrictive. En pratique, le texte résultant au lieu d’améliorer le statut de 1979 a servi à limiter les pouvoirs du gouvernement catalan et l’ensemble de la procédure a démontré le manque de volonté de la partie espagnole de faire des pas en avant dans cette direction. C’est à ce moment qu’il est devenu évident que l’administration étatique se sert du système territorial en vigueur —établi en 1978 après une très longue période de centralisme et dictature— pour perpétuer le statut de minorité permanente des Catalans en Espagne. Aujourd’hui, un nombre croissant de Catalans estime que les affaires qui affectent le territoire et sa population sont administrées par Madrid sans tenir compte de leurs besoins et souvent contre leurs intérêts les plus élémentaires. Désormais, ils sont de plus en plus nombreux à avoir perdu tout espoir d’être traités équitablement dans le cadre de l’État espagnol.

Le gouvernement catalan s’est engagé à tenir un référendum sur la question des rapports que la société catalane doit établir avec l’Espagne: rester dans la situation actuelle de subordination politique ou constituer une nation catalane indépendante. C’est le chemin choisi par le Québec en 1995 et par l’Écosse en 2014 et respecté par les gouvernements du Canada et du Royaume-Uni. Par contre, au nom d’une interprétation restrictive pour ne pas dire partisane de la Constitution, les autorités espagnoles ont déclaré illégal le référendum et sont résolues à tout faire pour l’empêcher. Pour l’heure, elles se consacrent à rendre impossible les préparatifs. Face à des actions présumées de désobéissance de représentants catalans élus par le peuple, les institutions de l’État semblent vouloir revenir aux agissements de la dictature, au point que les bases qui permettent l’existence d’un gouvernement démocratique sont mises en danger.

La coalition qui gouverne la Catalogne a exprimé sa ferme détermination de tenir le référendum. Cette fermeté ne doit pas être considérée comme un défi, mais comme un acte démocratique. Les dirigeants se limitent à exécuter le mandat qui leur a été confié par les centaines de milliers, voire millions, de manifestants qui ont défilé chaque année pacifiquement depuis 2010; par les deux millions trois cents mille voix obtenues lors de la consultation symbolique du mois de novembre 2014; par les près de deux millions de voix qui ont donné une majorité absolue aux forces politiques pro-indépendance aux élections catalanes de septembre 2015; finalement, donnée fort importante, par les trois quarts de la population catalane qui, d’après les sondages d’opinion, sont favorables à la tenue du référendum, indépendamment de leur intention de vote sur la question. Ce sont les Catalans qui doivent déterminer le devenir collectif de leur société et leur poser directement la question est la seule façon raisonnable de connaître l’opinion de chacun sur une question absolument fondamentale.

Après tout, un référendum est une bonne solution pour tout le monde. Pour les Catalans sans aucun doute parce que, quelque soit le résultat, il servira à ouvrir un dialogue sur l’instauration d’une nouvelle relation avec l’Espagne, fondée sur la reconnaissance de leurs droits en tant que peuple, y compris le droit à déterminer en dernière instance les modalités de cette relation.

Un référendum peut s’avérer bénéfique aussi pour l’Espagne, puisqu’il obligera son gouvernement et les autres forces politiques à repenser les fondements du régime instauré en 1978. Celui-ci est le résultat d’une transition de la dictature à la démocratie, conçu et mis en place par des cadres politiques issus du franquisme. Une issue satisfaisante de la question catalane donnerait à la société espagnole l’opportunité de se libérer d’une fois pour toutes des fantasmes de son passé autoritaire et d’affronter enfin les anomalies d’un système politique gravement conditionné par ses origines.

Enfin, ce référendum sera bon pour l’Europe. En premier lieu pour une raison pratique, en permettant de résoudre un problème séculaire qui va empirer si on l’ignore et s’enkyste, car alors il deviendra un nouveau front d’instabilité à l’échelle continentale. Deuxièmement, et plus important encore, pour une simple question de principe. Au moment où le monde politique vit au milieu d’incertitudes grandissantes, alors que le projet européen est remis en question, voire rejeté par différents partis politiques et couches de la population, l’attitude des Catalans —décidément pro-européens, profondément attachés aux principes démocratiques et toujours attentifs à revendiquer pacifiquement— devrait être montrée comme un exemple de la seule manière acceptable de résoudre les différents qui opposent les pays et les nations au sein des États.

Tôt ou tard tous les pays européens et leurs institutions devront se prononcer sur cette question. Les aspirations légitimes des Catalans à être reconnus comme nation historique avec tous les droits collectifs qui en découlent est une question de démocratie; que leur lutte constante et pacifique soit récompensée est une question de justice.

Ceci est un communiqué préparé par le Col·lectiu Emma auquel les Col·lectiu de Praga et Col·lectiu Wilson adhèrent comme étant le leur aussi.

(Texte traduit de l’original anglais par M. Vallribera)

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