Le procès qui s’est tenu devant la Cour d’Assises de Paris, spécialement composée pour l’occasion, est celui d’un peuple identitaire, attaché à sa langue et sa culture et dont les revendications n’ont jamais trouvé d’échos à Paris que ceux de voir assimilés ses prévenus désireux d’une plus grande émancipation à de lourdes condamnations qui n’auraient selon le gouvernement français aucune corrélation avec des convictions politiques.
Mais ouvrons les yeux, alors que l’Etat ne reconnaît pas le statut de prisonnier politique, la dimension éminemment politique de l’accusation retenue lors de ce dernier procès contre les militants Battini, Tomasini et Verdi ainsi que la disproportion de leurs condamnations respectives pour les faits qui leur sont reprochés ne permettent plus de mettre en doute d’un traitement et d’une justice d’exception concernant la cause corse.
La nation corse existe. Elle est dotée d’un peuple, d’un territoire et elle jouit, pour organiser le bien public, d’un gouvernement légitime élu au suffrage universel. L’Histoire a légué à cette nation une langue, un drapeau, une terre, un héritage national et le devoir de défendre ses droits naturels à l’autodétermination dans l’Europe des peuples face à la puissance centraliste allant jusqu’à nier son existence.
A cette énième provocation judiciaire et en dépit de la volonté d’avoir engagé ; après une la démilitarisation en juin 2014 du FLNC du 22 octobre ; un processus de paix, nous sommes toujours scandalisés de voir avec quel déni, le « pays des Droits de l’Homme » traite de ce que Michel Rocard appelait le « problème corse ».
Cette mauvaise appréciation est d’autant plus étonnante que le 24 septembre, la manifestation en faveur de l’ « Amnistia » a Aiacciu a réuni en dehors des clivages partisans plus de 10.000 personnes ayant pour point commun d’appartenir à ce peuple fière, le peuple corse.
Cette incompétence de l’Etat à reconnaître les rapports conflictuels que son gouvernement jacobin entretient avec la Corse a conduit à une politique de l’attentisme irresponsable.
De plus, alors que la violence clandestine a vocation à disparaître et que la Corse veut s’inscrire de manière irréversible dans une logique de paix, il faut rappeler, que partout dans le monde où il y a eu des conflits, il y a eu des lois d’amnistie.
L’archaïsme étatique est d’autant plus consternant que l’Assemblée de Corse délibérante, s’est prononcée à l’unanimité pour que la question des prisonniers politiques soit posée au gouvernement. Le non traitement de la question des prisonniers politiques s’inscrit dans le prolongement de la négation de la reconnaissance des projets de lois votées par l’Assemblée de Corse : co-officialité, inscription dans la Constitution d’un statut à part de la Corse.
L’Etat de droit ne respecterait-il donc pas l’un des ses principes majeurs à savoir la démocratie et l’expression par le souverain peuple d’aspirations et de revendications ?
Le combat de la Corse pour sa pleine reconnaissance n’est pas une lutte isolée. En effet, en Europe, la Catalogne, l’Ecosse, l’Irlande du Nord, le Pays Basque, la Galice, le Veneto, … aspirent à contrebalancer l’idée reçue selon laquelle les frontières seraient intangibles.
Partout en Europe se réveillent les nations culturelles contre les états nations, la diversité linguistique contre le monolinguisme, la démocratie locale contre la technocratie centralisée.